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Captation: Jean Derome, Joane Hétu, Danielle Palardy Roger: Les lucioles; Chorale Joker; Joane Hétu: Chorale Joker — Les lucioles; vidéo: Robin Pineda Gould; avril 2020; 7:19
    • Jeudi 5 mars 2020
      20h00
    Amphithéâtre – Le Gesù
    1200, rue de Bleury – H3B 3J3
    métro Place-des-Arts
    • En salle

Événement périphérique

  • Rencontre pré-concert: La place du conte et de la théâtralité dans la musique d’aujourd’hui
    Lab du Vivier

Après avoir été acclamé au FIMAV 2019… l’unique reprise à Montréal, à ne pas manquer!

Assumant la direction artistique de la pièce, Joane Hétu s’est associée à Jean Derome et Danielle Palardy Roger pour la composition de l’œuvre. Tous trois font partie du chœur et s’en partagent aussi la direction. Ils sont entourés de 17 fameux vocalistes issus de la collectivité montréalaise d’instrumentistes, chanteurs, danseurs et comédiens, qui ont tous en commun une frénésie de s’exprimer par les sons de la voix.

Les lucioles est un conte échevelé élaboré à partir du pouvoir qu’ont les mouches à feu d’émettre de la lumière la nuit au début de l’été. Telles de petites braises dansant dans les ténèbres, depuis longtemps, elles ont nourri l’imaginaire des poètes. La lueur fantomatique de la luciole évoque l’évanescence de la vie; de notre vie, qui, comme la beauté, n’est qu’une lueur fugitive dans la nuit du temps. Borges a écrit: «Est-elle un empire la lumière qui s’éteint ou une luciole?». Pasolini a associé la luciole à la résistance: une fragile lueur luttant contre l’éclat aveuglant du pouvoir.

Les lucioles de Hétu, Derome, Roger nous apparaît ainsi comme une allégorie sur l’espoir dans un monde sans cesse menacé par l’obscurantisme, les simulacres du pouvoir, la bêtise financière et le chaos des États. Ombres menaçantes et lumières éclatantes se suivent. Comment s’y retrouve-t-on parmi les ténèbres qui nous entourent? Utilisant la gestuelle de direction propre aux musiques improvisées, les trois compositeurs mènent le chœur à travers les nombreux mouvements et dédales de la pièce. Et la lumière des lucioles jaillira au milieu de mondes inouïs de phonétiques et de mots se soulevant entre bruissements et chuintements.

Les lucioles est une audacieuse œuvre-collage, un jeu d’écriture collective où l’on sent la complicité des compositeurs. Et quoiqu’on y sente les influences de chacun il demeure, en filigrane, l’essence créatrice de Joane Hétu.

Participant·es

Programme

Captations vidéo

Clips vidéo

  • Chorale Joker au FIMAV — Diaporama (Photos: Martin Morissette); dimanche 19 mai 2019; 3:09

Images de l’événement

  • Chorale Joker / Joane Hétu: Chorale Joker — Les lucioles, Amphithéâtre – Le Gesù, Montréal (Québec) [Photo: Céline Côté, Montréal (Québec), 5 mars 2020]
  • Chorale Joker / Joane Hétu: Chorale Joker — Les lucioles, Amphithéâtre – Le Gesù, Montréal (Québec) [Photo: Céline Côté, Montréal (Québec), 5 mars 2020]
  • Chorale Joker / Joane Hétu: Chorale Joker — Les lucioles, Amphithéâtre – Le Gesù, Montréal (Québec) [Photo: Céline Côté, Montréal (Québec), 5 mars 2020]
  • Chorale Joker / Joane Hétu: Chorale Joker — Les lucioles, Amphithéâtre – Le Gesù, Montréal (Québec) [Photo: Céline Côté, Montréal (Québec), 5 mars 2020]
  • Chorale Joker / Joane Hétu: Chorale Joker — Les lucioles, Amphithéâtre – Le Gesù, Montréal (Québec) [Photo: Céline Côté, Montréal (Québec), 5 mars 2020]
  • Chorale Joker / Joane Hétu: Chorale Joker — Les lucioles, Amphithéâtre – Le Gesù, Montréal (Québec) [Photo: Céline Côté, Montréal (Québec), 5 mars 2020]
  • Chorale Joker / Joane Hétu: Chorale Joker — Les lucioles, Amphithéâtre – Le Gesù, Montréal (Québec) [Photo: Céline Côté, Montréal (Québec), 5 mars 2020]
  • Chorale Joker / Joane Hétu: Chorale Joker — Les lucioles, Amphithéâtre – Le Gesù, Montréal (Québec) [Photo: Céline Côté, Montréal (Québec), 5 mars 2020]
  • Chorale Joker / Joane Hétu: Chorale Joker — Les lucioles, Amphithéâtre – Le Gesù, Montréal (Québec) [Photo: Céline Côté, Montréal (Québec), 5 mars 2020]
  • Chorale Joker / Joane Hétu: Chorale Joker — Les lucioles, Amphithéâtre – Le Gesù, Montréal (Québec) [Photo: Céline Côté, Montréal (Québec), 5 mars 2020]
  • Chorale Joker / Joane Hétu: Chorale Joker — Les lucioles, Amphithéâtre – Le Gesù, Montréal (Québec) [Photo: Céline Côté, Montréal (Québec), 5 mars 2020]
  • Chorale Joker / Joane Hétu: Chorale Joker — Les lucioles, Amphithéâtre – Le Gesù, Montréal (Québec) [Photo: Céline Côté, Montréal (Québec), 5 mars 2020]

En images

  • Promo Le Devoir
  • Joane Hétu: Chorale Joker — Les lucioles, Amphithéâtre – Le Gesù, Montréal (Québec), jeudi 5 mars 2020
  • Carton
  • Carton

Pièces graphiques

La presse en parle

Critique

Joël Pagier, Revue & Corrigée, 1 juin 2021

Nourrie par l’imaginaire et la ferveur iconoclaste d’une vingtaine d’artistes dont le premier instrument n’est sans doute pas la voix, la pièce Les lucioles, interprétée par la Chorale Joker de Joane Hétu, Jean Derome et Danielle Palardy Roger déborde d’une énergie foutraque et diablement communicative. Cette bande d’allumés issue de la scène improvisée de Montréal, parmi lesquels on croise notamment Lori Freedman, Alexandre St-Onge, Michel F Côté, Diane Labrosse, David Cronkite, Géraldine Eguiluz ou Isaiah Ceccarelli, semble même s’en donner à cœur joie, bousculant les conventions du genre avec une bonne humeur réjouissante en ces temps de morosité programmée. Insecte à la luminosité naturelle, la luciole ou mouche à feu, dont l’éclat n’a d’égale que la fugacité, n’en est pas à son coup d’essai poétique. Pasolini lui-même voyait dans sa disparition une métaphore de la culture dévorée par la Société du Spectacle, et dans son Projet Luciole de 2014, le romancier Nicolas Truong comparait sa survivance à une lueur «brillant encore au cœur des nuits surveillées». À bien écouter d’ailleurs, on comprend que le texte martyrisé par les Jokers décline lui aussi la brillance et la fragilité de son sujet en autant de signes d’espoir contre l’obscurité. Mais s’il assume la délicatesse de David face à la force brute de Goliath, le livret ne traite pas la résistance de ces points luttant dans la nuit sous la forme d’une diatribe militante, mais comme un conte dont l’esthétique relèverait plus du cubisme que du naturalisme, un collage surréaliste dont le sens profond se dissimule sous l’apparent effet du hasard. D’un strict point de vue musical, l’ensemble — constitué d’improvisateurs aguerris, d’instrumentistes, de danseurs ou de comédiens — obéit au principe de la conduction et se laisse guider par une série de signes instantanés à travers les divers moments de la pièce, alternant soli et tutti, figures imposées ou laissées à discrétion, déplacements des masses sonores, canons successifs conduisant à la folie bruitiste, voix confinant à l’épuisement, durées ad lib ou arrêts soudains. Il faut tendre l’oreille si l’on veut saisir le contenu et plus encore si l’on veut atteindre au sens, comme dans ces films où le spectateur doit participer activement à la création. Mais après plusieurs écoutes, la langue employée se laisse apprivoiser, au point que l’opacité de certains détails nous offre un sésame singulier vers une compréhension générale et une intelligence réelle, non seulement du discours, mais aussi des enjeux dans toute leur dimension poétique et musicale. Fondée en 2012, la Chorale Joker relève de ces groupes d’artistes dont le projet compte peut-être moins que le rassemblement en un temps et un lieu précis. On peut donc raisonnablement penser que Joane Hétu, dont l’Ensemble SuperMusique réunit également, depuis 1998, une vingtaine d’instrumentistes émargeant bien souvent chez Joker, appartient à cette indispensable lignée d’êtres fédérateurs capables d’illuminer les esprits dans les ténèbres de l’individualisme.

… déborde d’une énergie foutraque et diablement communicative.

Review

Phil Zampino, The Squid’s Ear, 12 mars 2021

For those interested in vocal improvisation, the latest Chorale Joker under Joane Hétu’s direction is an achievement in large scale vocal ensemble work. Like Maggie Nicol’s The Gathering, Hétu has assembled a large colection of 20 improvisers to perform her compositions, as well as works from Jean Derome and Danielle Palardy Roger. The list of performers is impressive, including Derome, Roger, Lori Freedman, François Couture, Diane Labrosse, Alexandre St-Onge, Michel F Côté, Gabriel Dharmoo, etc. The color booklet shows the ensemble, and images from the scores, including gestures used for the conductions. The results are other-worldly, a hybrid of anticipated choral work and something inexplicable. It’s unusual improvised music of the highest order executed by masterful musicians who clearly enjoy the concept, and the concert from which this album is derived.

The Montréal-based Chorale Joker ensemble directed and conducted by Joane Hétu, Danielle Palardy Roger, and Jean Derome, who are also participants, is one of the most unusual and fascinating improvising vocal ensembles active, heard here in a concert coordinated with Productions SuperMusique at Le Vivier, Amphiteatre du Gesu, Montréal in early 2020; indescribably fascinating!

It’s unusual improvised music of the highest order executed by masterful musicians who clearly enjoy the concept, and the concert from which this album is derived.

Review

Nick Roseblade, Vital, no 1271, 10 février 2021

There is something primordial about Les lucioles by Chorale Joker. It’s a feeling you get deep down after listening to the album. The voices writhe, wail, and thrash about in an animalistic way. At times is it terrifying, but there is an order to the terror. But what did we expect? Joane Hétu, Jean Derome and Danielle Palardy Roger are leading the choir, which features 17 members of the Chorale Joker.

Portions of the album opener Premières lucioles; Haïku — errance feel like an alternative score to the primitive man sequence in 2001: A Space Odyssey. As with that sequence, which ended in violence and destruction, Haïku — errance feels no different. Sucking, and squelching sounds are made around a banshee-like din. Is this a sacrifice after a meal, with the Gods approving or the other members of the tribe showing both respect and impatience, for their time to eat? Either way, it is a visceral way to start an album.

Chaleur des lucioles; Chant des lucioles.1 is probably the most captivating track on the album. It opens with a piece of piercing electronics. Under this breathy wind instruments are played. These are perforated by grunts and gasps. As Chaleur des lucioles; Chant des lucioles.1 progresses the vocalisations become more and more pronounced. Some of the full-on guttural shouts. Others are almost inaudible warbles. Around halfway, the voices come together and start to sound like a conventional choir. It’s striking and really helps hammer everything home. The song is loosely translated to Heat of the Fireflies; Song of the Fireflies.1. The voices sound like fireflies hovering in the night. They drift one way, then another before landing and remaining still and serene.

What Les lucioles really does is allow the listener to drift away from the shackles of conventional music, melodic hooks, chorus, rhythm, etc, etc and allow you to hear something that is pure ID. It is filled with drifting motifs and abstract instrumentation. The real key to the album is the interplay between those glorious voices in the choir. This is where all the dynamic fun happens. As they pull together and apart, we are invited to experience how these small insects interact with each other and their environment. It’s through this understanding that we get a better grasp of how and why we act as we do.

What Les lucioles really does is allow the listener to drift away from the shackles of conventional music, melodic hooks, chorus, rhythm, etc, etc and allow you to hear something that is pure ID.

Le langage des signes de la Chorale Joker

Philippe Renaud, Le Devoir, 1 février 2021

«L’été, j’habite en campagne, et les lucioles, ça fait longtemps qu’elles me fascinent, avec leurs petites lumières qui apparaissent et disparaissent», raconte la compositrice Joane Hétu, qui lance le second chapitre de ce qui est probablement la plus audacieuse proposition de sa carrière, déjà jalonnée d’audaces: Les lucioles, allégorie autour de la lueur d’espoir jaillissant de nos ténèbres composée avec ses collègues Danielle Palardy Roger et Jean Derome, et interprétée par la chorale bruitiste Joker. Une œuvre complexe mais ludique qui offre une expérience d’écoute hors de l’ordinaire.

Vingt musiciens forment la Chorale Joker: dix-sept interprètes et improvisateurs dirigés par trois chefs de chœur, qui portent également le chapeau d’interprète, ce qui ajoute une couche de complexité à l’interprétation de l’œuvre, explique Joane Hétu, fondatrice (en 1991) et directrice de DAME (Distribution Ambiances magnétiques et cetera), diffuseur historique de la musique actuelle québécoise.

«Diriger et interpréter en même temps, c’est un très grand défi, et c’est ce qui m’intéresse dans la musique actuelle: cette idée démocratique où tu peux être à la fois compositeur, chef d’orchestre, improvisateur ou interprète, c’est très égalitaire.» La présentation des Lucioles avait un second degré de difficulté: «C’était la première fois que je faisais ça, proposer une œuvre de 70 minutes, jouée par des musiciens qui n’ont pas de partitions et qui doivent suivre les indications du chef d’orchestre.»

La partition des Lucioles existe pourtant, mais ce sont les chefs qui la lisent. Et elle est transcrite en signes — un code visuel, des gestes que lance le chef à ses interprètes, qui maîtrisent le langage. Cette manière de diriger une chorale est empruntée au compositeur et chef d’orchestre américain Walter Thompson, inventeur du «sound painting», une méthode où le chef d’orchestre, le «peintre sonore», signale à son orchestre les sons qu’il désire entendre pour construire son œuvre. La chorale Joker a même créé son propre vocabulaire gestuel: il comporte 80 signes, mais seulement une trentaine est nécessaire pour jouer Les lucioles.

Les interprètes chantent, bien sûr, mais crient aussi, ricanent, font des bruits avec leurs bouches, clament aussi ces haïkus qui, dès le premier tableau, représentent la lumière se frayant un chemin dans l’obscurité. À certains égards, Les lucioles rappelle l’œuvre chorale du compositeur hongrois György Ligeti (Lux aeterna, 1961).

Présenté en primeur au Festival international de musique actuelle de Victoriaville en 2019,  Les lucioles a été repris par la chorale Joker au Gesù le 5 mars 2020, représentation enregistrée que l’on découvre aujourd’hui et qui, on le conçoit, est aussi stimulante pour les tympans que pour les rétines, la performance en direct comportant une dimension physique, théâtrale. L’œuvre d’Hétu - Derome - Palardy Roger a aussi une trame narrative: «J’invite les gens dans une salle pour écouter une chorale qui improvise, or j’ai toujours cru qu’il me fallait un fil conducteur, une histoire, dans le projet Joker», explique Joane Hétu.

«Pour Les lucioles, on a travaillé sur le thème de l’émergence de la lumière à travers l’obscurité» au fil de six tableaux composés à six mains, celles des deux chefs d’orchestre attitrés de l’Ensemble SuperMusique, Danielle Palardy Roger et Joane Hétu, et du chef invité, Jean Derome. «Danielle s’est occupée de l’obscurité; c’est elle qui a composé les deux tableaux, très différents du reste de l’œuvre.»

Ainsi, il convient d’aborder Les lucioles non pas comme un album, mais plutôt comme l’enregistrement d’une œuvre de théâtre sonore et musical, concède Joane Hétu. Elle ose la comparaison avec les enregistrements d’opéras, qui sont aussi des objets théâtraux autant que musicaux: «On ne voit plus les chanteurs, les costumes, les décors, mais on peut suivre l’histoire quand même», d’autant que le livret détaillé des Lucioles fournit à l’auditeur quelques clés pour comprendre le récit.

Une œuvre complexe mais ludique qui offre une expérience d’écoute hors de l’ordinaire.